vendredi 3 août 2012

Recuerdos de Andalucia (deuxième partie) : Ronda

Hemingway a écrit : "La ville entière, et aussi loin que porte le regard dans le paysage alentour, tout n'est que décor romantique". Rainer Maria Rilke la décrit à son ami Rodin comme "un site incomparable, une gigantesque structure de roches qui porte sur son dos une petite ville blanchie et reblanchie à la chaux et qui fait un pas vers l'autre rive avec elle sur ses flancs..."



Dressée sur une falaise tombant en à-pic dans le rio Guadalevin, Ronda est l'une des plus anciennes villes d'Espagne. Véritable nid d'aigle dans la Sierra andalouse, elle est convoitée et conquise par de nombreuses armées : romaines, arabes, catholiques, et même les troupes napoléoniennes passèrent par là.
La ville est séparée en deux par "el Tajo", la faille au fond de laquelle coule la "rivière de lait", le Guadalavin.
Ce sont les Arabes qui lui donnèrent peu à peu le visage de la  ville que nous connaissons en renforçant ses murailles et en construisant de nombreux édifices importants au Sud de la faille. 

"El Tajo", la faille qui coupe la ville en deux

Après la reconquête par les Rois Catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand II d'Aragon, les terres de l'ancienne taïfa de Ronda furent divisées et distribuées en remerciement aux valeureux chevaliers ce qui eut des conséquences désastreuses pour l'économie de la cité. Une intolérance religieuse dans toute la région provoqua le départ des arabes et des juifs. Ronda devra attendre le XVIIIe siècle pour que la ville connaisse un nouvel essor. C'est donc à cette époque que furent construit de nouveaux quartiers au Nord de la faille avec les arènes et le fameux Pont Neuf reliant ancienne et nouvelle ville.

Puente Nuevo

Le Puente Nuevo, le Pont Neuf qui enjambe avec ses trois arches cette gorge impressionnante à 98 m de hauteur est construit tout en pierre à la fin du XVIIIe siècle. Il aura fallu 42 ans entre le début du chantier et son inauguration en 1793. Véritable symbole de la ville, c'est l'attraction touristique par excellence. Mais au risque de casser l'image romantique du lieu, bien des événements tragiques s'y sont produits. L'architecte qui conçut le pont descendit avec une nacelle pour inspecter son oeuvre. lorsqu'il tenta de rattraper son chapeau qui s'envolait, il bascula et s'écrasa dans le ravin. Par la suite, la partie centrale du pont devint une prison et pendant la période sombre de la guerre civile, les opposants au régime francquiste étaient jetés vivants depuis le haut du pont. Hemingway s'inspira de ces faits pour son  roman "Pour qui sonne le glas".
Pour profiter de la vue présente sur toutes les cartes postales, il fut descendre un chemin qui commence Plaza Auxiliadora dans la vieille ville. 

Plaza Maria Auxiliadora

Autre symbole construit dans la même période que le Pont Neuf, la Plaza de Toros mérite une petite visite. Même si vous n'êtes pas fan de tauromachie, il s'agit d'une des plus vieilles arènes d'Espagne et aussi d'une des plus belles. C'est ici que la Corrida moderne vit le jour et dont les règles furent instituées au XVIIIe siècle. 
Le bâtiment est de style néoclassique en grès jaune doré, dont les gradins sont répartis en deux niveaux superposés et possèdent 136 colonnes avec 68 arcs et le toit est recouvert de tuiles arabes. Son diamètre est de 60 mètres et sa capacité de 6000 spectateurs. En-dessous des gradins, un musée retrace 300 ans d'histoire de la tauromachie. 
On raconte que Orson Welles voulait que ses cendres soient dispersées dans le sables de l'arène de Ronda pour se mêler au sang des taureaux et des toreros mais ce privilège lui fut refusé. Les cendres furent répandues dans un domaine privé où le célèbre acteur et réalisateur  séjourna quelques temps à la fin de sa vie.

Plaza de Toros
Il faut ensuite se perdre dans le vieux quartier au Sud de la ville : les ruelles sont pavées de galets, les fenêtres protégées par des grilles en fer forgé, et les maisons pleines de charme éclate par leur blancheur. On peut y visiter de nombreux édifices comme la Casa del Rey Moro qui n'a rien de Maure puisqu'elle date du XVIIIe. On dirait une maison hantée mais ces petits jardins andalous en terrasse vaut le coup d'oeil. On peut surtout accéder à une mine fortifiée du XIVe siècle. A voir aussi au Sud du Pont Neuf, les bains arabes ou le Palacio de Mondragon.

Le quartier Sud de Ronda perché sur son roché

Notre promenade nous mène à la sortie de la ville en contrebas du vieux quartier où résistent quelques pans des anciennes murailles de l'Alcazaba. Derrière elle, on aperçoit l'église gothique Espiritu Santo construite en 1505 sous le règne de Ferdinand le Catholique.

Muraille de l'ancienne forteresse arabe et Eglise Espiritu Santo

Si vous arrivez devant la forteresse arabe et la plaza Ruedo Alameda, je vous propose une pause gastronomique bien méritée. L'Almocabar ressemble à un "petit buibui" : à l'intérieur, c'est à peine si il y a quatre tables mais qu'à cela ne tienne, si vous voulez réellement manger à l'intérieur, les garçons vous en dresse une cinquième. Ici, les hommes servent et les femmes cuisinent. Et quelle cuisine !!! C'est magnifiquement bien dressé, les plats sont raffinés. On n'imagine pas une telle gastronomie à cette endroit. Je vous conseille de commencer par le gaspacho de la maison : la cuisinière ajoute une écume sucrée tout à fait surprenante dans cette soupe froide typique du Sud de l'Espagne. C'est tout à fait délicieux et cela ne gâche rien à la recette originale. Pour un repas léger, la salade "Almocabar" avec son fromage du pays, sa pâte de coings, ses morceaux de poires et des pignons de pins vous fera penser à notre traditionnel salade de chèvre frais mais avec une touche d'originalité, un petit "je ne sais quoi" de différent. Les amateurs des produits de la mer pourront se régaler de la salade tiède de coquilles Saint Jacques et gambas, vinaigrette moutarde et miel. Et croyez moi sur parole, il y a plus de Saint Jacques et de Gambas que de morceaux de salade ! Pour les plus grands appétits, je recommande la morue confite ou le magret de canard. Pour terminer le repas en légèreté, n'hésitez pas à commander une de leur glace. Que vous commandiez un petit ou un grand repas, on commence toujours par vous servir une coupelle que le serveur remplit d'huile d'olive (espagnole bien sûr) d'une qualité exceptionnelle. Il la saupoudre ensuite d'un peu de sel noir volcanique. Il ne reste qu'à tremper un morceau de pain tout juste sorti du four. Simple mais efficace. Une pure merveille.... Le soir, alors que les températures se sont rafraîchies, la terrasse est parfaite pour déguster tous ces petits plats. Sur la Place Ruedo Alameda, en tant que touristes, on y vit véritablement à l'heure espagnol !!!

L'Almocabar


Pour terminer notre petite expédition dans la région de Ronda, je vous propose de séjourner au "Molino del Arco". Je n'ai pas l'habitude de parler de mes lieux de repos mais ce petit hôtel rural est un petit bijou dans un écrin de verdure,  situé à une dizaine de kilomètres de Ronda, perdu dans la campagne. Le personnel est charmant et prévenant, les chambres joliment décorée (meubles campagnards, lit à baldaquin), patios remplis de fleurs et beaux jardins. Et bien entendu pour les enfants et même les adultes qui ont envie de se rafraîchir après une journée passée sous le soleil andalou, une piscine complète le tableau.

Le Molino del Arco



1 commentaire:

  1. Quand je partirai, je n'aurais plus qu'à imprimer ton blog en guise de guide touristique ;-)
    Quant au petit buibui, ça me rappelle le café que tenait une grande-tante à David, dans le joli village de Calmarza et faisait une cuisine merveilleuse, malheureusement elle a arrêté quand son fils est décédé.

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